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AU REVOIR !

rent, et, entraînées par le rapide courant du fleuve, — qu’il se nommât Orénoque, Atabapo ou Guaviare, — les deux pirogues eurent bientôt perdu de vue la bourgade de San-Fernando.

À une heure de là, la jeune femme revit l’endroit où les falcas s’étaient échouées sur la rive droite, la place même où Jacques l’avait sauvée au péril de sa vie, pendant cette terrible tourmente du chubasco !

« Oui… ma Jeanne chérie… dit Jacques, et c’est là…

— C’est là, mon Jacques, que te vint la pensée de ne point abandonner ton cher Jean… de l’accompagner au milieu de tant de périls jusqu’au terme de son voyage…

— Et qui ne fut pas content ?… s’écria Germain Paterne. Ce fut bien le sergent Martial !… Oh ! pas content du tout, l’oncle à son neveu ! »

Pendant les jours suivants, les pirogues, favorisées par la brise, eurent une navigation très rapide. Elles franchirent sans trop de difficultés, puisqu’il ne s’agissait que de les descendre, les raudals de Maipure et d’Ature, puis dépassèrent l’embouchure du Meta et le village de Cariben. Les îles giboyeuses du fleuve fournissaient tout le gibier nécessaire, et la pêche ne cessait d’être fructueuse.

On arriva devant le rancho de M. Marchal à la Tigra. Là, promesse faite, promesse tenue. Les passagers des falcas furent pendant vingt-quatre heures les hôtes de cet excellent homme. Et avec quelle joie il les complimenta sur l’issue de leur entreprise, envisagée au double point de vue de la présence du colonel de Kermor à Santa-Juana et de « ce qui s’en était suivi ! »

À la Urbana les pirogues eurent à se ravitailler pour la dernière partie de leur expédition.

« Et les tortues ?… s’écria Germain Paterne. Jacques… te rappelles-tu les tortues… les myriades de tortues… Hein ! être arrivés ici à tortues…

— C’est dans ce village que nous nous sommes rencontrés… la première fois, monsieur Germain, dit la jeune femme.