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LE SUPERBE ORÉNOQUE.

tembre. Puis la baisse se continue jusqu’en novembre, avec légère recrudescence à cette époque, et ne prend fin qu’en avril.

Le voyage entrepris par M. Miguel et ses collègues allait donc s’accomplir pendant la période favorable à l’enquête des Atabaposistes, des Guaviariens et des Orénoquois.

Il y eut grand concours de leurs partisans à saluer les trois géographes sur le quai d’embarquement de Ciudad-Bolivar. On n’était qu’au départ, cependant, et que serait-ce à l’arrivée ! De vifs et bruyants encouragements leur furent adressés soit par les tenants du fameux fleuve, soit par ceux de ses prétendus tributaires. Et au milieu des carambas et des caraïs que ne ménageaient ni les porteurs de colis, ni les mariniers en achevant les préparatifs du démarrage, malgré le sifflet assourdissant des chaudières qui écorchait les oreilles, et des hennissements de la vapeur fusant à travers les soupapes, on entendait ces cris :

« Viva el Guaviare !

Viva el Atabapo !

Viva el Orinoco ! »

Puis, entre les partisans de ces opinions diverses, des discussions éclataient, qui menaçaient de mal finir, bien que M. Miguel essayât de s’entremettre entre les plus exaltés.

Placés sur le spardeck, le sergent Martial et son neveu assistaient à ces scènes tumultueuses, sans parvenir à y rien comprendre.

« Que veulent tous ces gens-là ?… s’écria le vieux soldat. C’est bien sûr quelque révolution… »

Ce ne pouvait en être une, puisque dans les États hispano-américains, les révolutions ne s’accomplissent jamais sans l’intervention de l’élément militaire. Or, on ne voyait pas là un seul des sept mille généraux de l’état-major du Venezuela.

Jean et le sergent Martial ne devaient pas tarder à être fixés à ce sujet, car, à n’en pas douter, au cours de la navigation, la discussion continuerait à mettre aux prises M. Miguel et ses deux collègues.

Bref, les derniers ordres du capitaine furent envoyés, — d’abord