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LE SUPERBE ORÉNOQUE.

M. Miguel et ses deux amis, hors du rouf, cherchaient vainement à reconnaître la cause de ce phénomène.

Des propos, échangés entre les deux pirogues, il ne résulta aucune explication plausible.

D’ailleurs, si ce mouvement des eaux se ressentait dans les deux falcas, le sol riverain n’en était pas exempt.

Aussi, presque au même instant, les habitants de la Urbana, abandonnant leurs cases, se dirigèrent-ils vers la berge.

M. Marchal et le chef civil ne tardèrent pas à rejoindre la population qu’un peu d’épouvante commençait à gagner.

Il était, alors quatre heures et demie du matin, et le jour allait poindre.

Les passagers des deux embarcations débarquèrent aussitôt et vinrent interroger le chef civil.

« Que se passe-t-il ?… demanda M. Miguel.

— Il y a sans doute un tremblement de terre dans la sierra Matapey, répondit le chef civil, et les secousses se propagent jusque sous le lit du fleuve… »

M. Miguel émit la même opinion.

Nul doute que la région ne fût soumise à ces trépidations dues aux commotions sismiques, très fréquentes dans les terrains des llanos.

« Mais… il y a autre chose… fit observer M. Miguel. Entendez-vous cette sorte de bourdonnement qui vient de l’est ? »

Et, en prêtant l’oreille, on percevait comme une espèce de ronflement, une basse continue, sur la nature de laquelle on ne pouvait se prononcer.

« Attendons, dit M. Marchal. Je ne crois pas que la Urbana ait rien à craindre…

— C’est mon avis, déclara le chef civil, et il n’y a aucun danger à rentrer dans les cases. »

C’était probable, et cependant il n’y eut que la minorité des habitants à suivre ce conseil. Au surplus, le jour s’accentuait, et peut-