à trois cents. Dans sa forme étrange, ce massif ressemblait volontiers à un énorme sphinx, le torse redressé, les pattes étendues, accroupi dans l’attitude du monstre ailé que la mythologie grecque a placé sur la route de Thèbes.
Était-ce un animal vivant, un monstre gigantesque, un mastodonte de dimension mille fois supérieure à ces énormes éléphants des régions polaires dont les débris se retrouvent encore ?… Dans la disposition d’esprit où nous étions, on l’aurait pu croire, — croire aussi que le mastodonte allait se précipiter sur notre embarcation et la broyer sous ses griffes…
Après un premier moment d’inquiétude peu raisonnée et peu raisonnable, nous reconnûmes qu’il n’y avait là qu’un massif de conformation singulière, dont la tête venait de se dégager des brumes.
Ah ! ce sphinx !… Un souvenir me revint, c’est que, la nuit pendant laquelle s’effectua la culbute de l’ice-berg, et l’enlèvement de l’Halbrane, j’avais rêvé d’un animal fabuleux de cette espèce, assis au pôle du monde, et dont seul un Edgar Poe, avec sa génialité intuitive, eût pu arracher les secrets !…
Mais de plus étranges phénomènes allaient attirer notre attention, provoquer notre surprise, notre épouvante même !…
J’ai dit que, depuis quelques heures, la vitesse du Paracuta s’accroissait graduellement. Maintenant elle était excessive, celle du courant lui restant inférieure. Or, voici que, tout à coup, le grappin de fer, qui provenait de l’Halbrane et placé à l’avant de notre canot, s’échappe hors de l’étrave, comme s’il eût été attiré par une puissance irrésistible, et la corde qui le retient est tendue à se rompre… Il semble que ce soit ce grappin qui nous remorque, en rasant la surface des eaux, vers le rivage…
« Qu’y a-t-il donc ?… s’écria William Guy.
— Coupe, bosseman, coupe, ordonna Jem West, ou nous allons nous briser contre les roches ! »
Hurliguerly s’élance vers l’avant du Paracuta pour couper la