— Assurément, monsieur Jeorling, répliqua le capitaine Len Guy. Vous conviendrez seulement que l’aspect de cette terre n’est point celui de l’île Tsalal à l’époque où la Jane l’avait accostée. On y distinguait alors des collines verdoyantes, des forêts épaisses, des arbres en pleine floraison, de vastes pâturages… et ici, à première vue, il n’y a que désolation et stérilité !…
— J’en conviens, stérilité et désolation, c’est toute cette terre !… Je vous demanderai, cependant, si votre intention n’est pas d’y débarquer, capitaine ?…
— Avec le canot ?…
— Avec le canot, dans le cas où le courant en éloignerait notre ice-berg.
— Nous n’avons pas une heure à perdre, monsieur Jeorling, et quelques jours de relâche pourraient nous condamner à un hivernage cruel, si nous arrivions trop tard pour franchir les passes de la banquise…
— Et, étant donné son éloignement, nous ne sommes pas en avance, fit observer Jem West.
— Je l’accorde, répondis-je en insistant. Mais s’éloigner de cette terre sans y avoir mis le pied, sans nous être assurés si elle n’a pas conservé les traces d’un campement, si votre frère, capitaine… ses compagnons… »
En m’écoutant, le capitaine Len Guy secouait la tête. Ce n’était pas l’apparition de cette côte aride qui pouvait lui rendre l’espoir, ces longues plaines infertiles, ces collines décharnées, ce littoral bordé par un cordon de roches noirâtres… Comment des naufragés eussent-ils trouvé à y vivre depuis quelques mois ?…
D’ailleurs, nous avions arboré le pavillon britannique que la brise déployait à la cime de l’ice-berg. William Guy l’eût reconnu, et il se fut déjà précipité vers le rivage.
Personne… personne !
En ce moment, Jem West, qui venait de relever certains points de repère, dit :