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le sphinx des glaces

carnet d’Arthur Pym, lorsqu’il s’accrocha au glaçon, et c’est ainsi que fut sauvé le journal que le métis mit à la disposition du romancier américain.

« Comprenez-moi… répétait Hunt, car je vous dis les choses telles que je les tiens de Dirk Peters… Tandis que la dérive l’entraînait, il cria de toutes ses forces… Pym, le pauvre Pym avait déjà disparu au milieu du rideau de vapeurs… Quant au métis, en se nourrissant de poissons crus qu’il put prendre, il fut ramené par un contre-courant à l’île Tsalal, où il débarqua à demi mort de faim…

À l’île Tsalal ?… s’écria le capitaine Len Guy. Et depuis combien de temps l’avait-il quittée ?…

— Depuis trois semaines… oui… trois semaines au plus… m’a déclaré Dirk Peters…

— Alors il a dû retrouver ce qui restait de l’équipage de la Jane… demanda le capitaine Len Guy, mon frère William et ceux qui avaient survécu avec lui ?…

— Non… répondit Hunt, et Dirk Peters a toujours cru qu’ils avaient péri jusqu’au dernier… oui… tous !… Il n’y avait plus personne sur l’île…

— Personne ?… répétai-je, très surpris de cette affirmation.

— Personne ! déclara Hunt.

— Mais la population de Tsalal ?…

— Personne… vous dis-je… personne !… île déserte… oui !… déserte !… »

Cela contredisait absolument certains faits dont nous étions sûrs. Après tout, il se pouvait que, lorsque Dirk Peters revint à l’île Tsalal, la population, prise d’on ne sait quelle épouvante, eût déjà cherché refuge sur le groupe du sud-ouest, et que William Guy et ses compagnons fussent encore cachés dans les gorges de Klock-Klock. Cela expliquait comment le métis ne les avait pas rencontrés et aussi comment les survivants de la Jane n’avaient plus rien eu à craindre des insulaires pendant les onze années de leur séjour sur l’île. D’autre part, puisque Patterson les y avait laissés