Page:Verne - Le Sphinx des Glaces, 1897.djvu/251

Cette page a été validée par deux contributeurs.
227
l’île tsalal.

Était-ce donc les restes de l’un de ces bizarres animaux décrits par Arthur Pym, et dont nous n’avions pas aperçu un seul échantillon jusqu’alors ?…

Un cri — ou plutôt une sorte de rugissement sauvage — s’échappa de la bouche de Hunt.

Son énorme main, qui se tendait vers nous, tenait un collier de métal…

Oui !… un collier de cuivre… un collier à demi rongé d’oxyde, sur lequel quelques lettres gravées se pouvaient lire encore.

Ces lettres formaient les trois mots que voici :

Tigre. — Arthur Pym. —

Tigre ! c’était le terre-neuve qui avait sauvé la vie à son maître, lorsque celui-ci était caché dans la cale du Grampus… Tigre, qui avait déjà donné des signes d’hydrophobie… Tigre qui, pendant la révolte de l’équipage, s’était jeté à la gorge du matelot Jones presque aussitôt achevé par Dirk Peters !…

Ainsi ce fidèle animal n’avait pas péri dans le naufrage du Grampus… Il avait été recueilli à bord de la Jane en même temps qu’Arthur Pym et le métis… Et, pourtant, le récit ne le mentionnait pas, et, même avant la rencontre de la goélette, il n’était plus question du chien…

Mille contradictions se pressaient dans mon esprit… Je ne savais comment concilier ces faits… Cependant, nul doute que Tigre eût été tiré du naufrage comme Arthur Pym, qu’il l’eût suivi jusqu’à l’île Tsalal, qu’il eût survécu à l’éboulement de la colline de Klock-Klock, qu’il eût enfin trouvé la mort dans cette catastrophe qui avait anéanti une partie de la population tsalalaise…

Mais, encore une fois, William Guy et ses cinq matelots ne pouvaient se trouver parmi ces squelettes qui jonchaient le sol, puisqu’ils étaient vivants au départ de Patterson, il y avait sept mois, et que la catastrophe datait de bien des années déjà !…

Trois heures plus tard, nous étions de retour à bord de l’Halbrane, n’ayant fait aucune autre découverte.