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le sphinx des glaces

Cette fois, je perçus très distinctement ces mots prononcés à mon oreille. Que signifiait cette recommandation, et pourquoi m’était-elle adressée ?… Ne pas oublier Arthur Pym ?… Mais, après son retour en Amérique, est-ce qu’il n’était pas mort… d’une mort soudaine et déplorable, dont personne ne connaissait ni les circonstances ni les détails ?…

Le sentiment me vint alors que je déraisonnais, et je me réveillai tout de bon, cette fois, avec le sentiment que je venais d’être troublé par un rêve d’une extrême intensité, dû à quelque trouble cérébral…

En un saut, je fus hors de mon cadre, et j’ouvris le volet de l’un des châssis de ma cabine…

Je regardai au-dehors.

Personne à l’arrière de la goélette, — si ce n’est Hunt, debout à la roue du gouvernail, l’œil fixé sur l’habitacle.

Je n’avais qu’à me recoucher. C’est ce que je fis, et, bien qu’il me semblât entendre le nom d’Arthur Pym résonner plusieurs fois à mon oreille, je dormis jusqu’au matin.

Lorsque je me levai, il ne me restait de cet incident de la nuit qu’une très vague, très fugitive impression, qui ne tarda pas à s’éteindre.

En relisant — le plus souvent, le capitaine Len Guy le faisait avec moi, — en relisant, dis-je, le récit d’Arthur Pym, comme si ce récit eût été le journal de l’Halbrane, — je remarquai le fait suivant, mentionné à la date du 10 janvier :

Dans l’après-midi, il se produisit un accident très regrettable, et précisément dans cette partie de mer que nous traversions alors. Un Américain, originaire de New York, le nommé Peter Vredenburgh, l’un des meilleurs matelots de l’équipage de la Jane, glissa et tomba entre deux quartiers de glace, disparut et ne put être sauvé.

C’était la première victime de cette funeste campagne, et combien d’autres devaient encore être inscrites au nécrologe de la malheureuse goélette !