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le sphinx des glaces

ment les parages sud de l’Atlantique et du Pacifique que recherchent les Français, les Anglais et les Américains pour cette pêche qui ne pourra plus s’exercer qu’au prix d’extrêmes fatigues. Il est même probable que cette industrie, si prospère autrefois, finira par prendre fin.

Voici ce qu’il y avait lieu de déduire de cet extraordinaire rassemblement de cétacés.

Depuis que le capitaine Len Guy avait eu avec moi cette conversation au sujet du roman d’Edgar Poe, je dois noter qu’il était devenu moins réservé. Nous causions assez souvent de choses et d’autres, et, ce jour-là, il me dit :

« La présence de ces baleines indique généralement que la côte se trouve à courte distance, et cela pour deux raisons. La première, c’est que les crustacés qui leur servent de nourriture ne s’écartent jamais très au large des terres. La seconde, c’est que les eaux peu profondes sont nécessaires aux femelles pour déposer leurs petits.

— S’il en est ainsi, capitaine, répondis-je, comment se fait-il que nous ne relevions aucun groupe d’îles entre les New-South-Orkneys et le cercle polaire ?…

— Votre observation est juste, répliqua le capitaine Len Guy, et, pour avoir connaissance d’une côte, il faudrait nous écarter d’une quinzaine de degrés dans l’ouest, où gisent les New-South-Shetlands de Bellingshausen, les îles Alexandre et Pierre, enfin la terre de Graham qui fut découverte par Biscoe.

— C’est donc, repris-je, que la présence des baleines n’indique pas nécessairement la proximité d’une terre ?…

— Je ne sais trop que vous répondre, monsieur Jeorling, et il est possible que la remarque dont je vous ai parlé ne soit pas fondée. Aussi est-il plus raisonnable d’attribuer le nombre de ces animaux aux conditions climatériques de cette année…

— Je ne vois pas d’autre explication, déclarai-je, et elle concorde avec nos propres constatations.