delà des limites assignées aux forces humaines, ne saurait l’arrêter… L’âme de leur capitaine serait en eux… le bras de leur lieutenant dirigerait leurs bras…
Voilà donc pourquoi le capitaine Len Guy refusait d’accepter des passagers à son bord, pourquoi il m’avait dit que ses itinéraires n’étaient jamais assurés, espérant toujours qu’une occasion s’offrirait à lui de s’aventurer vers la mer glaciale !…
J’ai même lieu de croire que si l’Halbrane eût été prête d’ores et déjà à entreprendre cette campagne, le capitaine Len Guy aurait donné l’ordre de mettre le cap au sud… Et, d’après les conditions de mon embarquement, je n’eusse pu l’obliger à continuer sa route pour me déposer à Tristan d’Acunha ?…
Du reste, la nécessité s’imposait de refaire de l’eau dans cette île, dont nous n’étions plus éloignés. Là, peut-être, aurait-on la possibilité de mettre la goélette en état de lutter contre les ice-bergs, d’atteindre la mer libre, puisque libre elle était au-delà du quatre-vingt-deuxième parallèle, de s’engager plus loin que ne l’avaient fait les Cook, les Weddell, les Biscoe, les Kemp, pour tenter enfin ce que tentait alors le lieutenant Wilkes de la marine américaine.
Eh bien, une fois à Tristan d’Acunha, j’attendrais le passage d’un autre navire. D’ailleurs, lors même que l’Halbrane eût été prête pour une telle expédition, la saison ne lui aurait pas encore permis de franchir le cercle polaire. En effet, la première semaine de septembre n’était pas achevée, et deux mois au moins devaient s’écouler avant que l’été austral eût rompu la banquise et provoqué la débâcle des glaces.
Les navigateurs le savaient déjà à cette époque, — c’est depuis la mi-novembre jusqu’au commencement de mars que ces audacieuses tentatives peuvent être suivies de quelque succès. La température est alors plus supportable, les tempêtes sont moins fréquentes, les ice-bergs se détachent de la masse, la barrière se troue, et un jour perpétuel baigne ce lointain domaine. Il y avait là des règles de