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VI


Deux jours se passèrent, pendant lesquels je consacrai toutes mes heures libres à courir la ville. Je faisais aussi de longues stations sur le pont qui unit les deux rives du Danube à l’île Svendor, et ne me lassais pas d’admirer ce magnifique fleuve.

Je l’avouerai, le nom de Wilhelm Storitz me revenait malgré moi fréquemment à l’esprit. C’était donc à Ragz qu’il demeurait d’habitude, et, ainsi que je l’appris bientôt, avec un seul serviteur connu sous le nom d’Hermann, ni plus sympathique, ni plus abordable, ni plus communicatif que son maître.

Il me sembla même que cet Hermann rappelait par sa tournure et sa démarche l’homme qui, le jour de mon arrivée, avait paru nous suivre, mon frère et moi, tandis que nous longions le quai Batthyani.

J’avais cru devoir ne rien dire à Marc de la rencontre que le capitaine Haralan et moi nous avions faite sur le boulevard Tékéli. Peut-être cela l’eût-il inquiété de savoir que Wilhelm Storitz était revenu à Ragz. Pourquoi obscurcir son bonheur d’une ombre d’inquiétude ? Mais je regrettais que ce rival éconduit ne fût pas absent de la ville, tout au moins jusqu’au jour où le mariage de Marc et de Myra serait un fait accompli.

Le 16, dans la matinée, j’allais descendre pour ma promenade habituelle, que je comptais, ce jour-là, prolonger à travers la campagne, aux environs de Ragz, lorsque mon frère entra dans ma chambre.

« J’ai fort à faire, mon ami, me dit-il, et tu ne m’en voudras pas si je te laisse seul.