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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

Roderich ne s’épargne point pour venir en aide aux pauvres gens ; comme je sais aussi que Mme Roderich, Mlle Myra sont à la tête des œuvres de bienfaisance.

— Ma mère et ma sœur ne font que ce que doivent faire les personnes de leur condition et de leur situation. À mes yeux, la charité est le plus impérieux des devoirs.

— Sans doute, ajoutai-je, mais il y a tant de manières de le remplir !

— C’est là le secret des femmes, mon cher Vidal, et une de leurs fonctions ici-bas.

— Oui, la plus noble, assurément.

— Enfin, reprit le capitaine Haralan, nous habitons une ville paisible, que les passions politiques ne troublent plus ou ne troublent guère, très jalouse cependant de ses droits et de ses privilèges qu’elle défendrait contre tout empiètement du pouvoir central. Je ne connais à nos concitoyens qu’un défaut…

— C’est ?…

— C’est d’être quelque peu enclins, à la superstition et de croire trop volontiers au surnaturel. Les légendes avec revenants et fantômes, évocations et diableries ont le don de leur plaire plus qu’il ne convient.

— Ainsi, dis-je, non point le docteur Roderich — un médecin doit, par définition, avoir la tête solide — mais votre mère… votre sœur ?…

— Oui, et tout le monde avec elles. Contre cette faiblesse, car c’en est une, je ne réussis point à réagir… Marc m’y aidera peut-être.

— À moins, dis-je, que Mlle Myra ne le pervertisse !

— Maintenant, mon cher Vidal, penchez-vous au-dessus du parapet… Dirigez vos regards vers le Sud-Est… là… à l’extrémité de la ville, apercevez-vous la terrasse d’un belvédère ?

— Oui, répondis-je, et il me semble bien que ce doit être la tour de l’hôtel Roderich.