Page:Verne - Le Secret de Wilhelm Storitz, 1910.djvu/41

Cette page a été validée par deux contributeurs.
33
LE SECRET DE WILHELM STORITZ

— Je la connais déjà par tes lettres, et je sais que tu es heureux.

— Plus que je ne saurais dire. Tu la verras, tu la jugeras, et tu l’aimeras, j’en suis sûr ! C’est la meilleure des sœurs que je te donne.

— Et que j’accepte, mon cher Marc, sachant d’avance que tu ne peux faire qu’un choix excellent. Mais pourquoi ne pas rendre visite au docteur Roderich dès ce soir ?

— Non, demain… Nous ne pensions pas que le bateau arriverait de si bonne heure, et on ne t’attendait que dans la soirée. C’est seulement par excès de prudence que nous sommes venus sur le quai, Haralan et moi, et bien nous en a pris, puisque nous avons assisté au débarquement. Ah ! si ma chère Myra avait su !… Comme elle regrettera !… Mais, je le répète, tu n’es attendu que pour demain. Mme Roderich et sa fille ont disposé de leur soirée, et demain elles t’en feront toutes leurs excuses.

— C’est convenu, Marc, répondis-je, et puisque nous nous appartenons pour quelques heures aujourd’hui, employons-les à causer, à parler du passé et de l’avenir, à échanger tout ce que deux frères peuvent avoir de souvenirs, après une année de séparation.

Marc me raconta alors son voyage depuis qu’il avait quitté Paris, toutes ses étapes marquées par le succès, son séjour à Vienne, à Presbourg, où les portes du monde artiste s’étaient grandes ouvertes devant lui. Il ne m’apprit rien, en somme. Un portrait signé de Marc Vidal ne peut être que très recherché, très disputé, et avec la même ardeur par les riches Autrichiens que par les riches Magyars.

— Je n’y pouvais suffire, mon cher Henri. Des demandes et même des enchères de toutes parts ! Que veux-tu, le mot avait été dit par un brave bourgeois de Presbourg ; « Marc Vidal fait plus ressemblant que nature. » Aussi, ajouta mon frère en plai-