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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

Cela ne nous avançait à rien. Impossible de rien déduire de ce fatras, quant à la reconstitution de la diabolique substance dont Wilhelm Storitz, avait fait un si criminel usage.

De même que son bourreau avait surgi du néant, en tombant frappé au cœur par le sabre d’Haralan, de même la malheureuse Myra ne reparaîtrait donc à nos yeux qu’étendue sur son lit de mort.

Dans la matinée du 24 juin, mon frère vint me trouver. Il me parut relativement plus calme.

« Mon cher Henri, me dit-il, j’ai voulu te faire part de la résolution que j’ai prise. Je pense que tu l’approuveras.

— N’en doute pas, répondis-je, et parle en pleine confiance. Je sais que tu n’auras écouté que la voix de la raison.

— De la raison et de l’amour, Henri. Myra n’est qu’à demi ma femme. Il manque à notre mariage la consécration religieuse, puisque la cérémonie a été interrompue avant que les paroles sacramentelles n’eussent été prononcées. Cela crée une situation fausse que je veux faire cesser, pour Myra, pour sa famille, pour tout le monde.

J’attirai mon frère dans mes bras, et lui dis :

— Je te comprends, Marc, et je n’imagine pas ce qui pourrait faire obstacle à tes désirs…

— Ce serait monstrueux, répondit Marc. Si le prêtre ne voit pas Myra, il l’entendra du moins déclarer qu’elle me prend pour mari comme je la prends pour femme. Je ne pense pas que l’autorité ecclésiastique fasse aucune difficulté.

— Non, mon cher Marc, non, et je me charge de toutes les démarches. »

Ce fut d’abord au curé de la cathédrale que je m’adressai, à l’archiprêtre qui avait officié à cette messe de mariage interrompue par une profanation sans exemple. Le vénérable vieillard me répondit que le cas avait été préalablement examiné, et que l’archevêque de Ragz lui avait donné une solution favorable.