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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

demment, il y avait là un homme que je ne pouvais voir, à genoux, et qui pleurait.

— Qui êtes-vous ? balbutiai-je avec effort, la gorge étranglée par L’émotion.

— Hermann, me répondit-on.

— Que voulez-vous ? »

En quelques phrases hachées, l’invisible serviteur de Storitz nous dit qu’il avait entendu M. Stepark formuler ses projets de destruction, et que, si ces projets étaient mis à exécution, il lui fallait renoncer à reprendre jamais l’apparence humaine. Que deviendrait-il, condamné ainsi à rester toujours seul au milieu des autres hommes ? Il suppliait que le chef de police, avant de détruire les flacons qu’il trouverait dans la cachette, lui permît d’absorber le contenu de l’un d’eux.

M. Stepark promit d’y consentir, en prenant toutefois les précautions qui s’imposaient, Hermann ayant des comptes à régler avec la justice. Par son ordre, quatre agents robustes appréhendèrent l’invisible personnage. On pouvait être certain qu’ils ne le lâcheraient pas.

M. Stepark et moi, précédant les quatre agents qui maîtrisaient le prisonnier, nous descendîmes l’escalier. Quelques marches nous conduisirent dans un caveau que la lumière venue par la trappe éclairait faiblement. Là, sur une étroite étagère, étaient alignés une série de flacons étiquetés, les uns n° 1, les autres n° 2.

Hermann, d’un ton impatient, réclama un de ces derniers, que lui tendit le chef de police. Alors nous vîmes, avec une indicible stupéfaction — bien que nous dussions nous attendre à ce spectacle, — le flacon décrire tout seul une courbe dans l’air, puis se renverser, comme si quelqu’un, l’ayant porté à sa bouche, en eût avidement absorbé le contenu.

Ce fut aussitôt une étrange merveille. À mesure qu’il buvait, Hermann semblait sortir du néant. On distingua d’abord une