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XV


Après la destruction de la maison Storitz, il m’a semblé que la surexcitation de Ragz s’était quelque peu calmée. On se rassurait en ville. Ainsi que je l’avais supposé, un certain nombre d’habitants inclinaient à croire que le « sorcier » se trouvait réellement dans sa demeure au moment où elle était envahie par la foule, et qu’il avait péri au milieu des flammes.

La vérité est qu’en fouillant les décombres, en remuant les cendres, on ne découvrit rien qui fût de nature à justifier cette opinion. Si Wilhelm Storitz avait assisté à l’incendie, c’était de quelque endroit où le feu ne pouvait l’atteindre.

Cependant, de nouvelles lettres reçues de Spremberg s’accordèrent sur ce point : c’est qu’il n’y avait pas reparu, que son serviteur Hermann n’y avait pas été signalé, et qu’on ignorait absolument où tous deux s’étaient réfugiés.

Par malheur, si un calme relatif régnait dans la ville, il n’en était pas ainsi à l’hôtel Roderich. L’état mental de notre pauvre Myra ne s’améliorait aucunement. Inconsciente, indifférente aux soins qu’on ne cessait de lui donner, elle ne reconnaissait personne. Aussi les médecins n’osaient-ils exprimer le moindre espoir.

Toutefois, bien qu’elle fût toujours d’une extrême faiblesse, sa vie ne paraissait pas menacée. Elle restait étendue sur son lit, presque sans mouvement, pâle comme une morte. Si l’on essayait de la soulever, des sanglots gonflaient sa poitrine, l’effroi se peignait dans ses yeux, ses bras se tordaient, des phrases décousues s’échappaient de ses lèvres. La mémoire lui revenait-elle alors ? Revoyait-elle, au milieu des troubles de son esprit,