Page:Verne - Le Secret de Wilhelm Storitz, 1910.djvu/160

Cette page a été validée par deux contributeurs.
144
LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

que cette intervention aurait pu s’exercer. La puissance du Diable ne s’arrête-t-elle pas, en effet, au seuil du sanctuaire ?

Un mouvement se fit à droite du chœur, et la foule dut s’ouvrir pour livrer passage à l’archiprêtre, au diacre, au sous-diacre, aux bedeaux, aux enfants de la maîtrise.

L’archiprêtre s’arrêta devant les marches de l’autel, s’inclina, et dit les premières phrases de l’Introït, tandis que les chantres entonnaient les versets du Confiteor.

Myra était agenouillée sur le coussin de son prie-Dieu, la tête baissée, dans une attitude fervente. Marc se tenait debout près d’elle, et ses yeux ne la quittaient pas.

La messe était dite avec toute la pompe dont l’église catholique a voulu entourer ses cérémonies solennelles. L’orgue alternait avec le plain-chant des Kyrie et les strophes du Gloria in Excelsis, qui éclataient sous les hautes voûtes.

Il se produisait parfois un vague bruit de foule remuante, de chaises déplacées, de sièges rabattus, que scandaient les pas des officiers de l’église veillant à ce que le passage de la grande nef demeurât libre sur toute sa longueur.

D’ordinaire, l’intérieur de la Cathédrale est plongé dans une pénombre où l’âme se livre avec plus d’abandon aux impressions religieuses. À travers les anciens vitraux où se dessine en couleurs somptueuses la silhouette des personnages bibliques, par les étroites fenêtres du style ogival de la première époque, par les verrières latérales, il ne vient qu’un jour incertain. Pour peu que le temps soit couvert, la grande nef, les bas-côtés, l’abside, restent sombres, et cette mystique obscurité n’est piquée que des pointes de feu qui brillent au sommet des longs cierges de l’autel.

Aujourd’hui, il en était autrement. Sous ce magnifique soleil, les fenêtres tournées vers l’Est et la rosace du transept s’embrasaient Un faisceau de rayons, traversant une des baies de l’abside, tombait directement sur la chaire suspendue à l’un