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LE SECRET DE WILHELM STORITZ.

ment secondé par Myra, charme et joie de cette soirée qui se prolongea assez tard. Sans se faire prier, elle se mit au clavecin, et nous chanta de vieilles chansons magyares, comme pour effacer cet abominable Chant de la Haine, qui avait retenti dans ce salon.

Au moment de nous retirer, elle me dit en souriant :

« Demain, monsieur Henri, n’allez pas oublier…

— Oublier, mademoiselle ?… répondis-je sur le ton plaisant qu’elle venait de prendre.

— Oui, oublier que c’est le jour de l’audience du Gouverneur, du « baillage de licence », pour employer l’expression consacrée.

— Ah ! vraiment ! c’est demain !…

— Et que vous êtes un des témoins de votre frère…

— Vous avez raison de me le rappeler, mademoiselle Myra. Témoin de mon frère !… Je ne m’en souvenais déjà plus.

— Cela ne m’étonne pas. J’ai remarqué que vous aviez parfois des distractions…

— Je m’en accuse, mais je n’en aurai pas demain, je vous le promets… Et pourvu que Marc n’en ait pas plus que moi…

— Je réponds de lui. Ainsi donc, à quatre heures précises.

— Quatre heures, mademoiselle Myra ?… Et moi qui croyais que c’était à cinq heures et demie !… Soyez donc sans crainte. Je serai là à quatre heures moins dix.

— Bonsoir !… Bonsoir au frère de Marc, qui va devenir le mien.

— Bonsoir, mademoiselle Myra, bonsoir ! »

Le lendemain, Marc eut quelques courses à faire dans la matinée. Il me parut avoir repris toute sa tranquillité, et je le laissai aller seul.

De mon côté, d’ailleurs, par surcroît de prudence, et pour avoir, si c’était possible, la certitude que Wilhelm Storitz n’avait pas été revu à Ragz, je me rendis à la Maison de Ville.

À M. Stepark, auprès de qui je fus immédiatement introduit, je demandai s’il avait quelque nouvelle information.