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le pays des fourrures.


chanson groënlandaise.

Le ciel est noir,
Et le soleil se traîne
À peine !
De désespoir
Ma pauvre âme incertaine
Est pleine !
La blonde enfant se rit de mes tendres chansons,
Et sur son cœur l’hiver promène ses glaçons !

Ange rêvé,
Ton amour qui fait vivre
M’enivre,
Et j’ai bravé
Pour te voir, pour te suivre
Le givre !
Hélas ! sous mes baisers et leur douce chaleur,
Je n’ai pu dissiper les neiges de ton cœur !

Ah ! que demain
À ton âme convienne
La mienne,
Et que ma main
Amoureusement tienne
La tienne !
Le soleil brillera là-haut dans notre ciel,
Et de ton cœur l’amour forcera le dégel !

Le 20 décembre, la famille esquimaude vint au fort Espérance prendre congé de ses habitants. Kalumah s’était attachée à la voyageuse, qui l’eût volontiers conservée près d’elle ; mais la jeune indigène ne voulait pas abandonner les siens. D’ailleurs, elle promit de revenir pendant l’été prochain au fort Espérance.

Ses adieux furent touchants. Elle remit à Mrs. Paulina Barnett une petite bague de cuivre, et reçut en échange un collier de jais dont elle se para aussitôt. Jasper Hobson ne laissa point partir ces pauvres gens sans une bonne provision de vivres qui fut chargée sur leur traîneau, et, après quelques paroles de reconnaissance prononcées par Kalumah, l’intéressante famille, se dirigeant vers l’ouest, disparut au milieu des épaisses brumes du littoral.