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une visite de voisinage.

morse, un capuchon, des bottes, des mitaines de même nature. Ces êtres, à demi sauvages, s’étaient approchés des Européens et les regardaient en silence.

« Personne ne sait l’esquimau ? » demanda Jasper Hobson à ses compagnons.

Personne ne connaissait cet idiome ; mais aussitôt, une voix se fit entendre, qui souhaitait la bienvenue en anglais :

« Welcome ! welcome ! »

C’était un Esquimau, ou plutôt, comme on ne tarda pas à l’apprendre, une Esquimaude, qui, s’avançant vers Mrs. Paulina Barnett, lui fit un salut de la main.

La voyageuse, surprise, répondit par quelques mots que l’indigène parut comprendre facilement, et une invitation fut faite à la famille de suivre les Européens jusqu’au fort. Les Esquimaux semblèrent se consulter du regard, puis, après quelques instants d’hésitation, ils accompagnèrent le lieutenant Hobson, marchant en groupe serré.

Arrivée à l’enceinte, la femme indigène, voyant cette maison dont elle ne soupçonnait pas l’existence, s’écria :

« House ! house ! snow-house ? »

Elle demandait si c’était une maison de neige, et pouvait le croire, car l’habitation se perdait alors dans toute cette masse blanche qui couvrait le sol. On lui fit comprendre qu’il s’agissait d’une maison de bois. L’Esquimaude dit alors quelques mots à ses compagnons, qui firent un signe approbatif. Tous passèrent alors par la poterne, et, un instant après, ils étaient introduits dans la salle principale.

Là, leurs capuchons furent retirés, et l’on put reconnaître les sexes. Il y avait deux hommes de quarante à cinquante ans, au teint jaune-rougeâtre, aux dents aiguës, aux pommettes saillantes, ce qui leur donnait une vague ressemblance avec des carnivores ; deux femmes encore jeunes, dont les cheveux nattés étaient ornés de dents et de griffes d’ours polaires ; enfin, deux enfants de cinq à six ans, pauvres petits êtres à mine éveillée, qui regardaient en ouvrant de grands yeux.

« On doit supposer que des Esquimaux ont toujours faim, dit Jasper Hobson. Je pense donc qu’un morceau de venaison ne déplaira pas à nos hôtes. »

Sur l’ordre du lieutenant Hobson, le caporal Joliffe apporta quelques morceaux de renne, sur lesquels ces pauvres gens se jetèrent avec une sorte d’avidité bestiale. Seule, la jeune Esquimaude qui s’était exprimée en anglais montra une certaine réserve, regardant, sans les quitter des yeux, Mrs. Paulina Barnett et les autres femmes de la factorerie. Puis, apercevant