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le pays des fourrures.

mais ce que je comprends moins, en vérité, c’est qu’il existe des volcans sur les continents polaires.

— Ils n’y sont pas très nombreux, dit Mrs. Paulina Barnett.

— Non, madame, répondit le lieutenant, mais on en compte, cependant, un certain nombre : à l’île de Jean-Mayen, aux îles Aléoutiennes, dans le Kamtchatka, dans l’Amérique russe, en Islande ; puis dans le sud, à la Terre de Feu, sur les contrées australes. Ces volcans ne sont que les cheminées de cette vaste usine centrale où s’élaborent les produits chimiques du globe, et je pense que le Créateur de toutes choses a percé ces cheminées partout où elles étaient nécessaires.

— Sans doute, monsieur Hobson, répondit le sergent, mais au pôle, sous ces climats glacés !…

— Et qu’importe, sergent, qu’importe que ce soit au pôle ou à l’équateur ! Je dirai même plus, les soupiraux doivent être plus nombreux aux environs des pôles qu’en aucun autre point du globe.

— Et pourquoi, monsieur Hobson ? demanda le sergent, qui paraissait fort surpris de cette affirmation.

— Parce que si ces soupapes se sont ouvertes sous la pression des gaz intérieurs, c’est précisément aux endroits où la croûte terrestre était moins épaisse. Or, par suite de l’aplatissement de la terre aux pôles, il semble naturel que… — Mais j’aperçois un signal de Kellet, dit le lieutenant, interrompant son argumentation. Voulez-vous nous accompagner, madame ?

— Je vous attendrai ici, monsieur Hobson, répondit la voyageuse. Ce massacre de morses n’a vraiment rien qui m’attire !

— C’est entendu, madame, répondit Jasper Hobson, et si vous voulez nous rejoindre dans une heure, nous reprendrons ensemble le chemin du fort. »

Mrs. Paulina Barnett resta donc sur le sommet de la falaise, contemplant le panorama si varié qui se déroulait sous ses yeux.

Un quart d’heure après, Jasper Hobson et le sergent Long arrivaient sur le rivage.

Les morses étaient alors en grand nombre. On pouvait en compter une centaine. Quelques-uns rampaient sur le sable au moyen de leurs pieds courts et palmés. Mais, pour la plupart, groupés par famille, ils dormaient. Un ou deux, des plus grands, mâles longs de trois mètres, à pelage peu fourni, de couleur roussâtre, semblaient veiller comme des sentinelles sur le reste du troupeau.

Les chasseurs durent s’avancer avec une extrême prudence, en profitant de l’abri des rochers et des mouvements de terrain, de manière à cerner quelques groupes de morses et à leur couper la retraite vers la mer. Sur