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sous d’épais sourcils, enfin une vraie face de cataplasme. J’étais prévenu de me défier — recommandation bien inutile. La défiance venait toute seule, dès qu’on se trouvait en sa présence.

Quand il eut finit de tracasser ses papiers, Kalkreuth leva le nez, prit la parole, et, dans un français très clair, il m’interrogea. Mais, afin de me donner le temps de la réflexion, je fis celui qui éprouve quelque difficulté à comprendre. J’eus même le soin de lui faire répéter chaque phrase.

Voici, en somme, ce qui fut demandé et répondu dans cet interrogatoire :

« Votre nom ?

— Natalis Delpierre.

— Français ?…

— Français.

— Et de votre métier ?

— Marchand forain.

— Forain… forain ?… Expliquez-vous… Je ne comprends pas ce que cela signifie !

— Oui… je cours les foires, les marchés… pour acheter… pour vendre !… Enfin forain, quoi !

— Vous êtes venu à Belzingen ?

— Apparemment.

— Qu’y faire ?

— Voir ma sœur, Irma Delpierre, que je n’ai pas vue depuis treize ans.

— Votre sœur, une Française qui est en service dans la famille Keller !…

— Comme vous dites ! »

Et là-dessus, il y eut un léger temps d’arrêt dans les questions du directeur de police.

« Ainsi, reprit Kalkreuth, votre voyage en Allemagne n’a pas d’autre but ?

— Pas d’autre.