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risque de choir au fond d’un ravin, ce n’était pas pour lui agréer. Quitte à ne point escalader la courtine, quand le soleil serait couché, si le forestier s’y obstinait, mieux valait le suivre jusqu’au pied de l’enceinte. Mais le docteur voulut tenter un dernier effort pour arrêter son compagnon.

« Tu sais bien, mon cher Nic, reprit-il, que je ne consentirai jamais à me séparer de toi… Puisque tu persistes à te rendre au château, je ne te laisserai pas y aller seul.

— Bien parlé, docteur Patak, et je pense que vous devriez vous en tenir là.

— Non… encore un mot, Nic. S’il fait nuit, lorsque nous arriverons, promets-moi de ne pas chercher à pénétrer dans le burg…

— Ce que je vous promets, docteur, c’est de faire l’impossible pour y pénétrer, c’est de ne pas reculer d’une semelle, tant que je n’aurai pas découvert ce qui s’y passe.

— Ce qui s’y passe, forestier ! s’écria le docteur Patak en haussant les épaules. Mais que veux-tu qu’il s’y passe ?…

— Je n’en sais rien, et comme je suis décidé à le savoir, je le saurai…

— Encore faut-il pouvoir y arriver, à ce château du diable ! répliqua le docteur, qui était à bout d’arguments. Or, si j’en juge par les difficultés que nous avons éprouvées jusqu’ici, et par le temps que nous a coûté la traversée des forêts du Plesa, la journée s’achèvera avant que nous soyons en vue…

— Je ne le pense pas, répondit Nic Deck. Sur les hauteurs du massif, les sapinières sont moins embroussaillées que ces futaies d’ormes, d’érables et de hêtres.

— Mais le sol sera rude à monter !

— Qu’importe, s’il n’est pas impraticable.

— Mais je me suis laissé dire que l’on rencontrait des ours aux environs du plateau d’Orgall !

— J’ai mon fusil, et vous avez votre pistolet pour vous défendre, docteur.