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peu aux apparitions, et se riait-il volontiers des légendes. Un burg hanté par des esprits, cela était bien pour exciter son incrédulité. À son avis, dans ce que venait de lui raconter maître Koltz, il n’y avait rien de merveilleux, mais uniquement quelques faits plus ou moins établis, auxquels les gens de Werst attribuaient une origine surnaturelle. La fumée du donjon, la cloche sonnant à toute volée, cela pouvait s’expliquer très simplement. Quant aux fulgurations et aux mugissements sortis de l’enceinte, c’était pur effet d’hallucination.

Franz de Télek ne se gêna point pour le dire et en plaisanter, au grand scandale de ses auditeurs.

« Mais, monsieur le comte, lui fit observer maître Koltz, il y a encore autre chose.

— Autre chose ?…

— Oui ! Il est impossible de pénétrer à l’intérieur du château des Carpathes.

— Vraiment ?…

— Notre forestier et notre docteur ont voulu en franchir les murailles, il y a quelques jours, par dévouement pour le village, et ils ont failli payer cher leur tentative.

— Que leur est-il arrivé ?… » demanda Franz de Télek d’un ton assez ironique.

Maître Koltz raconta en détail les aventures de Nic Deck et du docteur Patak.

« Ainsi, dit le jeune comte, lorsque le docteur a voulu sortir du fossé, ses pieds étaient si fortement retenus au sol qu’il n’a pu faire un pas en avant ?…

— Ni un pas en avant ni un pas en arrière ! ajouta le magister Hermod.

— Il l’aura cru, votre docteur, répliqua Franz de Télek, et c’est la peur qui le talonnait… jusque dans les talons !

— Soit, monsieur le comte, reprit maître Koltz. Mais comment expliquer que Nic Deck ait éprouvé une effroyable secousse, quand il a mis la main sur la ferrure du pont-levis…