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jours, ajouta Frik, car ils comptent faire halte à Werst, avant de repartir pour Kolosvar.

— Pourvu qu’on ne leur dise pas de mal de mon auberge ! pensa Jonas inconsolable. Ils seraient capables de n’y point vouloir prendre logement ! »

Et, depuis trente-six heures, l’excellent hôtelier était obsédé par cette crainte qu’aucun voyageur n’oserait désormais manger et dormir au Roi Mathias.

En somme, ces demandes et ces réponses, échangées entre le berger et son maître, n’avaient en rien éclairci la situation. Et comme ni le jeune forestier ni le docteur Patak n’avaient reparu à huit heures du matin, pouvait-on être fondé à espérer qu’ils dussent jamais revenir ?… C’est qu’on ne s’approche pas impunément du château des Carpathes !

Brisée par les émotions de cette nuit d’insomnie, Miriota n’avait plus la force de se soutenir. Toute défaillante, c’est à peine si elle parvenait à marcher. Son père dut la ramener au logis. Là, ses larmes redoublèrent… Elle appelait Nic d’une voix déchirante… Elle voulait partir pour le rejoindre… Cela faisait pitié, et il y avait lieu de craindre qu’elle tombât malade.

Cependant il était nécessaire et urgent de prendre un parti. Il fallait aller au secours du forestier et du docteur sans perdre un instant. Qu’il y eût à courir des dangers, en s’exposant aux représailles des êtres quelconques, humains ou autres, qui occupaient le burg, peu importait. L’essentiel était de savoir ce qu’étaient devenus Nic Deck et le docteur. Ce devoir s’imposait aussi bien à leurs amis qu’aux autres habitants du village. Les plus braves ne refuseraient pas de se jeter au milieu des forêts du Plesa, afin de remonter jusqu’au château des Carpathes.

Cela décidé, après maintes discussions et démarches, les plus braves se trouvèrent au nombre de trois : ce furent maître Koltz, le berger Frik et l’aubergiste Jonas, — pas un de plus. Quant au magister Hermod, il s’était soudainement ressenti d’une douleur de