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Mais à peine le chef de police s’était-il avancé de cinq ou six pas, qu’il était arrêté par ces mots prononcés d’une voix impérieuse :

« Un pas de plus, et nous faisons feu ! »

Cette menace n’était point pour arrêter Karl Dragoch, et il répondit :

« Si c’est Latzko en personne qui parle ainsi, je me charge de lui fermer la bouche ! »

Et l’escouade continua de se porter vers les charrettes. Mais, à cet instant, la résine fut arrachée de la main de l’agent, et l’obscurité redevint profonde.

Aucun coup de feu n’avait encore été tiré ni d’un côté ni de l’autre. Il y eut lutte corps à corps, qui mit les agents et les fraudeurs aux prises. Les premiers comprirent, mais trop tard, qu’ils ne seraient pas en force. La lutte tournerait contre eux.

Comme elle durait déjà depuis quelques minutes et qu’il fallait en finir, des détonations éclatèrent. Les revolvers s’étaient mis de la partie. Quelques contrebandiers, quelques agents furent atteints au milieu de l’obscurité. Mais elle ne pouvait se prolonger, et, après une attaque aussi violente que le fut la résistance, Karl Dragoch dut rallier ses hommes et abandonner la place. En quittant la clairière, l’escouade remonta la route afin de rejoindre les autres agents, disséminés en amont de la Morave.

Un quart d’heure après, le convoi, avec deux hommes légèrement atteints, se remettait en marche. Avant quatre heures, il atteignait la crique de Kordak. Aucune surveillance aux environs. Les marchandises furent immédiatement embarquées. Sauf le chef, qui restait à terre, tous passèrent à bord. Puis, le chaland démarra et il descendait le Danube sous l’action d’un courant assez rapide, au moment où le soleil lui envoyait ses premiers rayons.

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