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vi

DE RATISBONNE À PASSAU

Le lendemain, au jour naissant, M. Jaeger, le premier des deux, se dégagea du tôt, fit ses ablutions avec l’eau fraîche du fleuve, rajusta ses vêtements, et, coiffé de son chapeau à larges bords, se campa debout à l’arrière de l’embarcation.

De là, en amont et en aval de l’arche, ses regards observèrent tour à tour les bateaux en marche comme ceux qui étaient encore amarrés aux quais des deux rives. Ce spectacle semblait l’intéresser vivement. Il suivait des yeux les préparatifs de départ qui se faisaient çà et là, des voiles se hissant, des cheminées de remorqueurs empanachées de fumées noirâtres. Mais ce qui attirait surtout son attention, c’étaient les chalands qui descendaient ou se préparaient à descendre le Danube.

Pendant une dizaine de minutes, M. Jaeger resta ainsi en observation. À ce moment, il fut rejoint par Ilia Krusch qui sortait du tôt.

« Eh bien ! comment avez-vous dormi ? lui demanda son compagnon.

— Aussi profondément que vous, monsieur Krusch, et tout comme si j’avais passé la nuit dans la meilleure chambre du meilleur hôtel. Et, maintenant, je vais prendre congé de vous jusqu’au souper, car je reviendrai avant le soir.

— À votre aise, monsieur Jaeger, et tandis que vous irez à vos affaires, je vais aller vendre notre pêche au marché de Ratisbonne.

— Le plus cher possible, monsieur Krusch, recommanda M. Jaeger, car c’est à mon profit…

— Le plus cher possible, en effet. Mais, je le crains, vous aurez quelque peine à regagner la totalité de vos cinq cents florins…

— Ce n’est pas mon avis », se contenta de répondre M. Jaeger.

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