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sarabie, M. Hanish de la Hongrie, M. Ouroch de la Serbie et M. Titcha de la Moldavie. En tout cinq membres ayant qualité pour délibérer régulièrement.

On ne l’a point oublié, à l’unanimité la Commission avait fait choix du chef de police Karl Dragoch pour organiser de nouvelles poursuites contre les fraudeurs qui faisaient la contrebande par le Danube. Karl Dragoch s’était mis immédiatement en campagne. On lui avait laissé toute liberté d’agir sous sa responsabilité, et il ne devait en référer aux commissaires que lorsqu’il le jugerait opportun. Que faisait-il ? Dans quelles conditions opérait-il, on ne savait, et d’ailleurs, toute indiscrétion eût pu compromettre le succès de ses recherches.

Or, on avait été sans nouvelles de lui jusqu’au jour où le bruit courut d’un engagement de l’escouade qu’il dirigeait avec la bande de Latzko, à l’entrée des Petites Karpates. Dans cette rencontre avec des forces trop supérieures, il avait dû se retirer, et depuis lors, on ne savait plus ce qu’il était devenu.

Ce fut peu de temps après que le président Roth reçut une dénonciation de telle gravité qu’il crut devoir réunir la Commission internationale à Pest où le coupable présumé serait assurément mis en état d’arrestation dès son arrivée. Cette dénonciation attirait l’attention des commissaires sur une série de faits qui lui donnaient un caractère des plus sérieux. Elle n’était point anonyme, d’ailleurs, et portait la signature du chef de police de Belgrade, qui disait ses renseignements puisés aux meilleures sources.

Il aurait été contraire à toute raison que le président Roth n’en tint pas compte, et, après en avoir causé avec ceux de ses collègues qu’il put rencontrer, résolution fut prise de convoquer la Commission pour le 2 juin dans la capitale de la Hongrie. Et c’est ainsi que sur les dix membres qui la composaient, cinq à cette date tenaient séance dans une des salles de l’Hôtel de Ville à Pest.

Cette séance ne devait pas être publique, mais, ainsi que cela se fait d’habitude pour les séances qui ne doivent pas être publiques, la salle était pleine de privilégiés dès neuf heures du matin. Du reste, la Commission n’avait point à juger l’accusé en dernier ressort. Mais, ayant été instituée en vue de poursuivre Latzko et sa bande, elle déclarerait simplement si l’homme qui allait comparaître devant elle serait oui ou non traduit devant la justice qui lui appliquerait la loi.

À dix heures et demie, les commissaires étaient en place, et sur l’ordre de M. Roth, l’accusé fut introduit.

Ilia Krusch parut, véritablement plus hébété que jamais, les yeux baissés, l’air honteux, et, il faut l’avouer, ayant bien la mine d’un coupable.

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