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la maison à vapeur.

Le 30 juillet, douze cent trente-sept prisonniers tombaient successivement devant le peloton d’exécution, et cinquante autres n’échappaient au dernier supplice que pour mourir de faim et d’étouffement dans la prison où on les avait renfermés.

Le 28 août, sur huit cent soixante-dix Cipayes qui fuyaient Lahore, six cent cinquante-neuf étaient impitoyablement massacrés par les soldats de l’armée royale.

Le 23 septembre, après la prise de Delhi, trois princes de la famille du roi, l’héritier présomptif et ses deux cousins, se rendaient sans conditions au général Hodson, qui les emmena avec une escorte de cinq hommes seulement au milieu d’une foule menaçante de cinq mille Indous, — un contre mille. Et cependant, à mi-route, Hodson fit arrêter le char qui portait les prisonniers, il monta près d’eux, il leur ordonna de se découvrir la poitrine, il les tua tous trois à coups de revolver. « Cette sanglante exécution, de la main d’un officier anglais, dit M. de Valbezen, devait exciter dans le Pendjab la plus haute admiration. »

Après la prise de Delhi, trois mille prisonniers périssaient par le canon ou la potence, et avec eux, vingt-neuf membres de la famille royale. Le siège de Delhi, il est vrai, avait coûté aux assiégeants deux mille cent cinquante et un Européens et seize cent quatre-vingt-six natifs.

À Allahabad, horribles boucheries humaines, faites non plus parmi les Cipayes, mais dans les rangs de l’humble population, que des fanatiques avaient presque inconsciemment entraînée au pillage.

À Lucknow, le 16 novembre, deux mille Cipayes, passés par les armes au Sikander Bagh, jonchaient de leurs cadavres un espace de cent vingt mètres carrés.

À Cawnpore, après le massacre, le colonel Neil obligeait les condamnés, avant de les livrer au gibet, à lécher et nettoyer de leur langue, proportionnellement à leur rang de caste, chaque tache de sang restée dans la maison où les victimes avaient péri. C’était, pour ces Indous, faire précéder la mort par le déshonneur.

Pendant l’expédition dans l’Inde centrale, les exécutions des prisonniers furent continuelles, et, sous les feux de la mousqueterie, « des murs de chair humaine s’écroulaient sur la terre ! »

Le 9 mars 1858, à l’attaque de la Maison jaune, lors du second siège de Lucknow, après une épouvantable décimation de Cipayes, il paraît constant