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hod contre banks.

l’artillerie dans les pays montagneux ou dans les jungles inaccessibles aux chevaux, travaux de force pour le compte des particuliers qui les emploient comme bêtes de trait. Ces géants, puissants et dociles, facilement et rapidement dressables, par suite d’un instinct spécial qui les porte à l’obéissance, sont d’un emploi général dans les diverses provinces de l’Indoustan. Or, comme ils ne multiplient pas à l’état de domesticité, il faut les chasser sans cesse pour suffire aux demandes de la péninsule et de l’étranger.

Aussi les poursuit-on, les traque-t-on, les prend-on par les moyens susdits. Et cependant, malgré la consommation qui s’en fait, leur nombre ne paraît pas diminuer ; il en reste en quantités considérables sur les divers territoires de l’Inde.

Et, j’ajoute, il en reste « trop », ainsi qu’on va bien le voir.

Les deux éléphants s’étaient rangés, comme je l’ai dit, de manière à laisser passer notre train ; mais, après lui, ils avaient repris leur marche, un moment interrompue. Presque aussitôt, d’autres éléphants apparaissaient en arrière, et, pressant le pas, rejoignaient le couple que nous venions de dépasser. Un quart d’heure plus tard, on en pouvait compter une douzaine. Ils observaient Steam-House, ils nous suivaient, se tenant à une distance de cinquante mètres au plus. Ils ne paraissaient point désireux de nous rattraper ; de nous abandonner, pas davantage. Or, cela leur était d’autant plus facile, que, sur ces rampes qui contournaient les principales croupes des Vindhyas, le Géant d’Acier ne pouvait accélérer son pas.

Un éléphant, d’ailleurs, sait se mouvoir avec une vitesse plus considérable qu’on n’est tenté de le croire, — vitesse qui, suivant M. Sanderson, très compétent en cette matière, dépasse quelquefois vingt-cinq kilomètres à l’heure. À ceux qui étaient là, rien de plus aisé, conséquemment, soit de nous atteindre, soit de nous devancer.

Mais il ne paraissait pas que ce fût leur intention, — en ce moment du moins. Se réunir en plus grand nombre, c’est ce qu’ils voulaient sans doute. En effet, à certains cris, lancés comme un appel par leur vaste gosier, répondaient des cris de retardataires qui suivaient le même chemin.

Vers une heure après-midi, une trentaine d’éléphants, massés sur la route, marchaient à notre suite. C’était maintenant toute une bande. Rien ne prouvait que leur nombre ne s’accroîtrait pas encore. Si un troupeau de ces pachydermes se compose ordinairement de trente à quarante individus, qui forment une famille de parents plus ou moins rapprochés, il n’est pas rare de