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mathias van guitt.

disposées et reliées entre elles. À l’extrémité d’un levier horizontal, qui supportait cette armature, pendait un nœud coulant, ou plutôt une boucle, formée par une grosse tresse de lianes.

« Eh ! qu’est cela ? m’écriai-je.

— Cela, répondit Banks, après avoir bien regardé, c’est tout simplement une souricière, mais je vous laisse à penser, mes amis, quelles souris elle est destinée à prendre !

— Un piège à tigres ? s’écria le capitaine Hod.

— Oui, répondit Banks, un piège à tigres, dont la porte, fermée par le madrier que retenait cette boucle de lianes, est retombée, parce que la bascule intérieure a été touchée par quelque animal.

— C’est la première fois, répondit Hod, que je vois dans une forêt de l’Inde un piège de ce genre. Une souricière, en effet ! Voilà qui n’est pas digne d’un chasseur !

— Ni d’un tigre, ajouta Fox.

— Sans doute, répondit Banks, mais s’il s’agit de détruire ces féroces animaux, et non de les chasser par plaisir, le meilleur piège est celui qui en attrape le plus. Or, celui-ci me paraît ingénieusement disposé pour attirer et retenir des fauves, si méfiants et si vigoureux qu’ils soient !

— J’ajoute, dit alors le colonel Munro, que, puisque l’équilibre de la bascule qui retenait la porte du piège a été rompu, c’est que probablement quelque animal s’y est fait prendre.

— Nous le saurons bien ! s’écria le capitaine Hod, et si la souris n’est pas morte !… »

Le capitaine, joignant le geste aux paroles, fit sonner la batterie de sa carabine. Tous l’imitèrent et se tinrent prêts à faire feu. Évidemment, nous ne pouvions mettre en doute que cette construction ne fût un piège, du genre de ceux qui se rencontrent fréquemment dans les forêts de la Malaisie. Mais, s’il n’était pas l’œuvre d’un Indou, il présentait toutes les conditions qui rendent très pratiques ces engins de destruction : sensibilité excessive, solidité à toute épreuve. Nos dispositions prises, le capitaine Hod, Fox et Goûmi s’approchèrent du piège dont ils voulaient d’abord faire le tour. Nul interstice entre les troncs verticaux ne leur permit de regarder à l’intérieur. Ils écoutèrent avec attention. Aucun bruit ne décelait la présence d’un être vivant dans ce cube de bois, aussi muet qu’une tombe.