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PREUVES MATÉRIELLES.

— Où pensez-vous que soit Torrès actuellement ?

— Je pense qu’il doit être à Manao.

— Et vous espérez qu’il parlera, qu’il consentira à vous remettre bénévolement ce document que vous avez refusé de lui payer du prix qu’il en demandait ?

— Je l’espère, monsieur, répondit Joam Dacosta. La situation, maintenant, n’est plus la même pour Torrès. Il m’a dénoncé, et par conséquent il ne peut plus conserver un espoir quelconque de reprendre son marché dans les conditions où il voulait le conclure. Mais ce document peut encore lui valoir une fortune, qui, si je suis acquitté ou condamné, lui échappera à jamais. Or, puisque son intérêt est de me vendre ce document, sans que cela puisse lui nuire en aucune façon, je pense qu’il agira suivant son intérêt. »

Le raisonnement de Joam Dacosta était sans réplique. Le juge Jarriquez le sentit bien. Il n’y fit que la seule objection possible :

« Soit, dit-il, l’intérêt de Torrès est sans aucun doute de vous vendre ce document… si ce document existe !

— S’il n’existe pas, monsieur, répondit Joam Dacosta d’une voix pénétrante, je n’aurai plus qu’à m’en rapporter à la justice des hommes, en attendant la justice de Dieu ! »