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LA JANGADA

trer dans cet endroit du cœur où les convictions se forment ; mais il ne se rendit pas encore.

Il ne faudrait pas s’en étonner. Magistrat, procédant à cet interrogatoire, il ne savait rien de ce que savent ceux qui ont suivi Torrès depuis le commencement de ce récit. Ceux-là ne peuvent douter que Torrès n’ait entre les mains la preuve matérielle de l’innocence de Joam Dacosta. Ils ont la certitude que le document existe, qu’il contient cette attestation, et peut-être seront-ils portés à penser que le juge Jarriquez fait montre d’une impitoyable incrédulité. Mais qu’ils songent à ceci : c’est que le juge Jarriquez n’est pas dans leur situation ; il est habitué à ces invariables protestations des prévenus que la justice lui envoie ; ce document qu’invoque Joam Dacosta, il ne lui est pas produit ; il ne sait même pas s’il existe réellement, et, en fin de compte, il se trouve en présence d’un homme dont la culpabilité a pour lui force de chose jugée.

Cependant il voulut, par curiosité peut-être, pousser Joam Dacosta jusque dans ses derniers retranchements.

« Ainsi, lui dit-il, tout votre espoir repose maintenant sur la déclaration que vous a faite ce Torrès ?

— Oui, monsieur, répondit Joam Dacosta, si ma vie entière ne plaide pas pour moi !