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LA JANGADA

Cette prison était un ancien couvent de missionnaires, élevé sur le bord de l’un des principaux iguarapés de la ville. Aux détenus volontaires d’autrefois avaient succédé dans cet édifice, peu approprié à sa nouvelle destination, les prisonniers malgré eux d’aujourd’hui. La chambre occupée par Joam Dacosta n’était donc point une de ces tristes cellules que comporte le système pénitentiaire moderne. Une ancienne chambre de moine, avec une fenêtre, sans abat-jour, mais grillée, s’ouvrant sur un terrain vague, un banc dans un coin, une sorte de grabat dans l’autre, quelques ustensiles grossiers, rien de plus.

Ce fut de cette chambre que, ce jour-là 25 août, Joam Dacosta fut extrait vers onze heures du matin, et amené au cabinet des interrogatoires, disposé dans l’ancienne salle commune du couvent.

Le juge Jarriquez était là, devant son bureau, juché sur sa haute chaise, le dos tourné à la fenêtre, afin que sa figure demeurât dans l’ombre, tandis que celle du prévenu resterait en pleine lumière. Son greffier avait pris place à un bout de la table, la plume à l’oreille, avec l’indifférence qui caractérise ces gens de justice, prêt à consigner les demandes et les réponses.

Joam Dacosta fut introduit dans le cabinet, et,