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DE ROTTERDAM À COPENHAGUE.

rendre de Tonning à Rendsburg, il faut parcourir au moins cent cinquante kilomètres, alors qu’en droite ligne il n’y en a pas quatre-vingts.

Le pays est plat mais très vert : beaucoup de pâturages, où chevaux, moutons et vaches, disséminés par centaines, s’en donnent à plein ventre. Quelques collines boisées de temps à autre, des fabriques, des fermes coiffées d’énormes toits de chaume, dont les murs de brique, très bas, sont relevés par les montants gris des fenêtres aux volets verts ; puis une ou deux petites villes, Frederikstadt, Erfde, Wittenbergen, enfouies dans les arbres. La rivière est fort creuse, mais le chenal n’est pas toujours libre, tant il y circule de caboteurs de toutes sortes, et plus particulièrement des galiotes, rouges, bleues, vertes, véritable « home » flottant de la famille du marinier, et dont la grande voile jaune se découpe vivement sur le paysage. Aussi, malgré l’habileté du pilote bolsteinois, le Saint-Michel toucha-t-il par le talon, et ce ne fut pas sans peine qu’on parvint à le remettre à flot.

À Rendsburg, où nous arrivons à six heures du soir, se trouve la première écluse. Passerons-nous ? À première vue il est permis d’en douter. Le sas est si court ! Notre anxiété dura peu : au bout de deux minutes, le yacht est éclusé, mais si juste que, pour