Page:Verne - La Jangada, 1881, t2.djvu/24

Cette page a été validée par deux contributeurs.

17
LES PREMIERS INSTANTS.

femme ! Vous ? saviez tout alors, et le passé de Joam Dacosta vous était révélé !

— Oui, répondit Manoel, et que Dieu me punisse si, de ma part, il y a eu une hésitation !…

— Soit, Manoel, reprit Yaquita, mais à ce moment Joam Dacosta n’était pas encore arrêté. Maintenant la situation n’est plus la même. Quelque innocent qu’il soit, mon mari est aux mains de la justice ; son passé est dévoilé publiquement ; Minha est la fille d’un condamné à la peine capitale…

— Minha Dacosta ou Minha Garral, que m’importe ! s’écria Manoel, qui ne put se contenir plus longtemps.

— Manoel ! » murmura la jeune fille.

Et elle serait certainement tombée, si les bras de Lina n’eussent été là pour la soutenir.

« Ma mère, si vous ne voulez pas la tuer, dit Manoel, appelez-moi votre fils !

— Mon fils ! mon enfant ! »

Ce fut tout ce que put répondre Yaquita, et ces larmes, qu’elle refoulait avec tant de peine, jaillirent de ses yeux.

Tous rentrèrent dans l’habitation. Mais cette longue nuit, pas une heure de sommeil ne devait l’accourcir pour cette honnête famille, si cruellement éprouvée !