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DE ROTTERDAM À COPENHAGUE.

malgré nous. Nous l’avions pris à Deal pour piloter le Saint-Michel, mais seulement hors des passes de la rade des Dunes, à cause de la brume, qui menaçait de se lever dans l’après-midi du 4 juin ; mais lui, avec cette ténacité propre à la race anglaise, toujours à l’affût de la livre sterling, avait fini par nous convaincre de son « indispensabilité » pour la campagne que notre yacht se préparait à entreprendre.

Singulière histoire que celle de ce « gentleman », montant à bord du Saint-Michel, malgré nos refus réitérés, et finissant par s’y implanter, en dépit de nos résistances.

Thomas Pearkop est un homme de taille moyenne, large de figure, large d’épaules, large de ventre, en un mot tout en largeur, bien planté sur ses larges pieds enfouis dans de larges souliers sans talons. La physionomie était avenante, œil bleu, nez droit, — un de ces nez qui semblent doués de propriétés optiques, — teint hâlé tirant sur le rouge-brique, barbiche au menton, sans favoris ni moustaches, — enfin une bonne figure de marin.

Thomas Pearkop parlait d’une voix claire, apte à dominer le brouhaha du vent, mais il ne connaissait pas deux mots de français. Heureusement, je savais assez d’anglais pour le comprendre.