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LE BAS-AMAZONE.

devenu, depuis 1845, une importante ville de cent maisons. Au milieu de cette contrée fréquentée par les Tapuyas, ces Indiens du Bas-Amazone se confondent de plus en plus avec les populations blanches, et leur race finira par s’y absorber.

Cependant la jangada descendait toujours. Ici, elle rasait, au risque de s’y accrocher, ces griffes de mangliers, dont les racines s’étendaient sur les eaux comme les pattes de gigantesques crustacés ; là, le tronc lisse des palétuviers au feuillage vert pâle servait de point d’appui aux longues gaffes de l’équipe, qui la renvoyaient au fil du courant.

Puis ce fut l’embouchure du Tocantins, dont les eaux, dues aux divers rios de la province de Goyaz, se mêlent à celles de l’Amazone par une large embouchure ; puis le Moju, puis la bourgade de Santa-Ana.

Tout ce panorama des deux rives se déplaçait majestueusement, sans aucun temps d’arrêt, comme si quelque ingénieux mécanisme l’eut obligé à se dérouler d’aval en amont.

Déjà de nombreuses embarcations qui descendaient le fleuve, ubas, égaritéas, vigilindas, pirogues de toutes formes, petits et moyens caboteurs des parages inférieurs de l’Amazone et du littoral de l’Atlantique, faisaient cortège à la jangada, sem-