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À TOUT HASARD !

Il était parfaitement acquis maintenant à l’esprit du digne magistrat que la clef du document était un nombre, composé de deux ou plusieurs chiffres, mais que ce nombre, toute déduction semblait être impuissante à le faire connaître.

Ce fut cependant ce qu’entreprît, avec une véritable rage, le juge Jarriquez, et c’est à ce travail surhumain que, pendant cette journée du 28 août, il appliqua toutes ses facultés.

Chercher ce nombre au hasard, c’était, il l’avait dit, vouloir se perdre dans des millions de combinaisons, qui auraient absorbé plus que la vie d’un calculateur de premier ordre. Mais, si l’on ne devait aucunement compter sur le hasard, était-il donc impossible de procéder par le raisonnement ? Non, sans doute, et c’est à « raisonner jusqu’à la déraison », que le juge Jarriquez se donna tout entier, après avoir vainement cherché le repos dans quelques heures de sommeil.

Qui eût pu pénétrer jusqu’à lui en ce moment, après avoir bravé les défenses formelles qui devaient protéger sa solitude, l’aurait trouvé, comme la veille, dans son cabinet de travail, devant son bureau, ayant sous les yeux le document, dont les milliers de lettres embrouillées lui semblaient voltiger autour de sa tête.