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LA JANGADA

fleurs aux couleurs éclatantes : ce sont autant de squares naturels, ombragés d’arbres magnifiques, parmi lesquels domine le « sumaumeira », ce gigantesque végétal habillé d’une écorce blanche, et dont le large dôme s’arrondit en parasol au-dessus d’une noueuse ramure.

Quant aux diverses habitations privées, il faut les chercher parmi quelques centaines de maisons assez rudimentaires, les unes couvertes de tuiles, les autres coiffées des feuilles juxtaposées du palmier, avec la saillie de leurs miradors et l’avant-corps de leurs boutiques, qui sont pour la plupart tenues par des négociants portugais.

Et quelle espèce de gens voit-on sortir aux heures de la promenade, aussi bien de ces édifices publics que de ces habitations particulières ? Des hommes de haute mine, avec redingote noire, chapeau de soie, souliers vernis, gants de couleur fraîche, diamants au nœud de leur cravate ; des femmes en grandes et tapageuses toilettes, robes à falbalas, chapeaux à la dernière mode ; des Indiens, enfin, qui, eux aussi, sont en train de s’européenniser, de manière à détruire tout ce qui pouvait rester de couleur locale dans cette partie moyenne du bassin de l’Amazone.

Telle est Manao, qu’il fallait sommairement faire