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LA FAMILLE GARRAL.

était de la famille. Elle tutoyait la fille et la mère. Toute la vie de cette bonne créature s’était passée dans ces champs, au milieu de ces forêts, sur cette rive du fleuve, qui bornaient l’horizon de la ferme. Venue enfant à Iquitos, à l’époque où la traite des noirs se faisait encore, elle n’avait jamais quitté ce village, elle s’y était mariée, et, veuve de bonne heure, ayant perdu son unique fils, elle était restée au service des Magalhaës. De l’Amazone, elle ne connaissait que ce qui en coulait devant ses yeux.

Avec elle, et plus spécialement attachée au service de Minha, il y avait une jolie et rieuse mulâtresse, de l’âge de la jeune fille, et qui lui était toute dévouée. Elle se nommait Lina. C’était une de ces gentilles créatures, un peu gâtées, auxquelles on passe une grande familiarité, mais qui, en revanche, adorent leurs maîtresses. Vive, remuante, caressante, câline, tout lui était permis dans la maison.

Quant aux serviteurs, on en comptait de deux sortes : les Indiens, au nombre d’une centaine, employés à gages pour les travaux de la fazenda, et les noirs, en nombre double, qui n’étaient pas libres encore, mais dont les enfants ne naissaient plus esclaves. Joam Garral avait précédé dans cette voie le gouvernement brésilien.

En ce pays, d’ailleurs, plus qu’en tout autre, les