Page:Verne - La Chasse au Météore, Hetzel, 1908.djvu/237

Cette page a été validée par deux contributeurs.
218
LA CHASSE AU MÉTÉORE

— Parbleu ! ça n’est pas sorcier. Je vais flanquer leur bolide à l’eau. »

M. Lecœur se leva d’un bond. Son visage avait pâli sous le coup de l’intense émotion qui lui paralysait le cœur. Pas un instant, la pensée ne lui vint que Xirdal obéît à la colère et qu’il proférât des menaces dont la réalisation ne fût pas en son pouvoir. Il avait donné des preuves de sa puissance. De lui, on devait s’attendre à tout.

« Tu ne feras pas cela, Zéphyrin, s’écria M. Lecœur.

— Je le ferai, au contraire. Rien ne m’en empêchera. J’en ai assez, moi, et je vais m’y mettre pas plus tard que tout de suite.

— Mais tu ne songes donc pas, malheureux… »

M. Lecœur s’interrompit brusquement. Une pensée de génie, éblouissante et soudaine comme l’éclair, venait de naître tout d’une pièce dans son cerveau. Quelques instants suffirent à ce grand capitaine des batailles de l’argent pour en examiner le fort et le faible.

« Au fait !… » murmura-t-il. Un second effort de réflexion lui confirma l’excellence de son projet. S’adressant alors à Zéphyrin Xirdal : « Je ne te contredirai pas plus longtemps, dit-il carrément, en homme pressé pour qui les minutes sont des heures. Tu veux rejeter le bolide à la mer ? Soit ! Mais ne pourrais-tu me donner quelques jours de répit ?

— J’y suis bien forcé, s’écria Xirdal. Il faut que je fasse subir des modifications à la machine en vue du nouveau travail que je lui demande. Ces modifications exigeront cinq ou six jours.

— Cela nous reporterait donc au 3 septembre.

— Oui.

— Fort bien », dit M. Lecœur, qui sortit et se dirigea rapidement vers Upernivik, tandis que son filleul se mettait à l’ouvrage.

Sans perdre de temps, M. Lecœur se fit conduire à bord de l’Atlantic, dont la cheminée se mit aussitôt à vomir des torrents de fumée noire. Deux heures plus tard, son armateur retourné à terre, l’Atlantic fuyait à toute vapeur et disparaissait à l’horizon.

Comme tout ce qui est génial, le plan de M. Lecœur était d’une sublime simplicité. De ces deux solutions : dénoncer son filleul aux troupes inter-