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XIX

Dans lequel Zéphyrin Xirdal éprouve pour le bolide une aversion croissante, et ce qui s’ensuit.

Si Zéphyrin Xirdal avait été seul, serait-il parvenu sans anicroche à destination ? C’est possible, car tout arrive. On eût cependant fait montre de prudence en pariant pour la négative.

Quoi qu’il en soit, l’occasion avait manqué d’engager des paris à ce sujet, puisque sa bonne étoile l’avait mis sous la sauvegarde d’un Mentor, dont l’esprit pratique neutralisait la fantaisie outrancière de cet original. Zéphyrin Xirdal ignora donc les difficultés d’un voyage, à tout prendre assez compliqué mais que M. Robert Lecœur avait réussi à rendre plus simple qu’une promenade dans les environs.

Au Havre, où l’express les avait amenés en quelques heures, les deux voyageurs furent accueillis avec empressement à bord d’un superbe steamer, qui largua aussitôt ses amarres et gagna la haute mer sans attendre d’autres passagers.

L’Atlantic, en effet, n’était pas un paquebot, mais bien un yacht de cinq à six cents tonneaux affrété par M. Robert Lecœur et à leur disposition exclusive. En raison de l’importance des intérêts engagés, le banquier avait jugé utile de posséder un moyen de communiquer à son gré avec l’univers civilisé. Les énormes bénéfices déjà encaissés par lui dans sa spéculation sur les mines d’or lui permettant, d’autre part, les plus princières audaces, il s’était assuré la jouissance de ce navire, choisi entre cent autres en Angleterre.

L’Atlantic, fantaisie d’un lord multimillionnaire, avait été construit en vue des plus grandes vitesses. De formes fines et allongées, il pouvait, sous l’impulsion des quatre mille chevaux de ses machines, atteindre et même dépasser vingt nœuds. Le choix de M. Lecœur avait été dicté par cette particularité, qui, le cas échéant, serait d’un précieux avantage.