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LA CHASSE AU MÉTÉORE

nelles qui n’avaient exprimé jusque-là que la plus parfaite imbécillité.

La lueur s’accentua, devint flamme, à mesure que la lecture se poursuivait, s’achevait.

« Tiens !… Tiens !… Tiens !… » murmura, sur trois notes différentes, Zéphyrin Xirdal, qui se mit en devoir de procéder à une seconde lecture.

C’était assez son habitude de parler tout haut dans la solitude de sa chambre. Volontiers même, il parlait au pluriel, afin, sans doute, de se donner la flatteuse illusion d’un auditoire suspendu à ses lèvres, auditoire imaginaire qui ne pouvait manquer d’être fort nombreux, puisqu’il comptait tous les élèves, tous les admirateurs, tous les amis que Zéphyrin Xirdal n’avait jamais eus et qu’il n’aurait jamais.

Cette fois, il fut moins disert et se borna à sa triple exclamation. Puissamment intéressé par la prose du Journal, il en poursuivit la lecture en silence.

Que lisait-il donc de si passionnant ?

Le dernier de tout l’univers, il découvrait tout simplement le bolide de Whaston et en apprenait en même temps l’insolite composition, le hasard l’ayant fait tomber sur un article consacré à cette fabuleuse boule d’or.

— Voilà qui est farce !… déclara-t-il pour lui-même, quand il fut au bout de sa seconde lecture.

Il demeura quelques instants songeur, puis ses pieds quittèrent la barre de la fenêtre, et il se rapprocha de la table. La crise de travail était imminente.

Sans hésiter, il trouva, au milieu des autres, la revue scientifique qu’il désirait et dont il fit sauter la bande. La revue s’ouvrit d’elle-même à la page qu’il fallait.

Une revue scientifique a le droit d’être plus technique qu’un grand quotidien. Celle-ci ne s’en faisait pas faute. Les éléments du bolide — trajectoire, vitesse, volume, masse, nature — n’y étaient donnés en quelques mots, qu’après des pages de courbes savantes et d’équations algébriques.

Zéphyrin Xirdal s’assimila sans effort cette nourriture intellectuelle de nature pourtant assez indigeste, après quoi il jeta un coup d’œil sur le ciel et put ainsi constater qu’aucun nuage n’en tachait l’azur.