Page:Verne - L’Invasion de la mer - Le Phare du bout du monde, Hetzel, 1905.djvu/447

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
171
PENDANT TROIS JOURS.

Et, véritablement, le second du Century n’était plus maître de lui.

« Vasquez, reprit-il, combien y a-t-il d’ici au phare ?

— Trois milles tout au plus, en passant par-dessus les collines et en allant en droite ligne jusqu’au fond de la baie.

— Eh bien, j’irai, Vasquez… je partirai vers quatre heures… j’arriverai avant six heures… je me glisserai aussi loin que cela me sera possible. Il fera grand jour encore… mais on ne me verra pas… et moi… je verrai ! »

Il eût été inutile de chercher à dissuader John Davis. Vasquez d’ailleurs ne l’essaya pas, et, lorsque son compagnon lui dit :

« Vous resterez ici. Vous surveillerez la mer… Je serai revenu dans la soirée… J’irai seul… »

Il répondit, en homme qui a son plan :

« Je vous accompagnerai, Davis. Je ne serais pas fâché, moi non plus, d’aller faire un tour du côté du phare. »

C’était décidé, ce serait fait.

Pendant les quelques heures qui devaient s’écouler avant le moment du départ, Vasquez, laissant son compagnon seul sur la grève, s’isola dans la cavité qui leur avait servi de refuge et se livra à des besognes mystérieuses. Le second du Century le surprit une fois en train d’affûter soigneusement son large couteau sur un éclat de rocher, une autre fois, comme il déchirait une chemise en lanières qu’il tressait ensuite en manière de corde lâche.

Aux questions qui lui furent faites, Vasquez répondit évasivement, assurant qu’il s’expliquerait plus clairement le soir venu. John Davis n’insista pas.

À quatre heures, après avoir mangé un biscuit et un morceau de corn-beef, tous deux, armés de leurs revolvers, se mirent en route.

Un étroit ravin leur facilita la montée des collines dont ils atteignirent la crête sans trop de peine.

Devant eux s’étendait un large plateau aride, où poussaient