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auxquels étaient parfois mêlés plusieurs colons français. Un petit parti de soldats indigènes occupait le bordj, simple maisonnette qui dominait le milieu de la bourgade. Les spahis, auxquels cette population fit bon accueil, se répartirent dans les maisons arabes, tandis que l’ingénieur et les officiers recevaient l’hospitalité chez un compatriote.

Lorsque le capitaine Hardigan s’enquit de ce qu’il pouvait savoir du chef targui évadé de la prison de Gabès, le colon répondit qu’il n’en avait point entendu parler. Nulle part, aux environs de La Hammâ, ne fut signalée la présence de Hadjar. Tout portait à croire, d’ailleurs, que le fugitif avait regagné la contrée des chotts algériens en contournant le Fedjedj et trouvé refuge parmi les tribus touareg du Sud. Toutefois, un habitant de La Hammâ, qui revenait de Tozeur, avait entendu dire que Djemma s’était montrée dans les environs, mais quelle direction elle avait prise ensuite, on l’ignorait. Du reste, il convient de le rappeler, après l’évasion de Hadjar, après son débarquement sur le rivage de la Petite-Syrte, dès qu’il eut revu un instant sa mère, près du marabout, où l’attendaient des chevaux tout prêts, ses compagnons et lui s’étaient enfuis par une route que Djemma n’avait pas suivie après eux.

Le 19, au matin, sous un ciel un peu couvert qui promettait une journée moins chaude, le capitaine Hardigan donna le signal du départ. Une trentaine de kilomètres avaient été franchis entre Gabès et La Hammâ ; il n’en restait que la moitié jusqu’au Fedjedj. Ce serait l’affaire d’une journée de marche, et, le soir, la petite troupe camperait sur un point rapproché du chott.

Pour la dernière étape qui l’avait conduit à La Hammâ, l’ingénieur avait dû s’éloigner quelque peu du canal, et, pendant la première partie de cette journée, il le rejoignit à son entrée dans le chott. C’était donc sur un parcours de cent quatre-vingt-cinq kilomètres à travers cette longue dépression du Fedjedj, cotée entre quinze et vingt-cinq mètres au-dessus du niveau de la mer,