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l’invasion de la mer

n’a pas été rejeté à travers cette mer intérieure qui n’a jamais communiqué avec la Petite-Syrte, et il n’aurait pu franchir le seuil du littoral qu’à la condition d’être muni des puissantes ailes d’Icare, l’aventureux fils de Dédale ! Les observations faites dès la fin du XIXe siècle démontrent péremptoirement qu’une mer saharienne couvrant toute la région des sebkha et des chotts n’a jamais pu exister, puisque sur certains points l’altitude d’une partie de ces dépressions dépasse parfois de quinze à vingt mètres le niveau du golfe de Gabès, principalement pour celles qui sont le plus rapprochées de la côte, et jamais cette mer, au moins pendant les temps historiques, n’aurait eu l’étendue de cent lieues que lui attribuaient des esprits par trop imaginatifs.

« Toutefois, Messieurs, en la réduisant aux dimensions que permet la nature de ces terrains des chotts et des sebkha, il n’était pas impossible de réaliser ce projet d’une mer saharienne qui serait alimentée par les eaux du golfe de Gabès.

« Aussi, tel est le projet que formèrent quelques savants audacieux mais pratiques, dont, après maintes péripéties, l’exécution n’a pu être menée à bonne fin, et c’est son historique que je désire rappeler à vos souvenirs, ainsi que les tentatives vaines et les cruels déboires qui ont duré tant d’années. »

Un mouvement approbatif se fit entendre dans l’auditoire, et, comme le conférencier indiquait de la main une carte à grands points suspendue au mur au-dessus de l’estrade, tous les regards se portèrent de ce côté.

Cette carte comprenait la partie de la Tunisie et de l’Algérie méridionale, traversée par le trente-quatrième parallèle, et qui s’étend depuis le troisième degré de longitude est jusqu’au huitième. Là se dessinaient les grandes dépressions au sud-est de Biskra. C’était d’abord l’ensemble des chotts algériens, d’un niveau inférieur à celui des eaux méditerranéennes, compris sous les dénominations de Melrir, de Grand chott, de chott Asloudje et autres jusqu’à la frontière de la Tunisie. Depuis l’extrémité