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dénouement.

« S’ils ne voient pas notre feu de joie, s’écria Pistache c’est, qu’ils sont tous aveugles à bord de ce bateau-là !

Cependant, cet embrasement du bouquet d’arbres ne dura pas plus d’une heure. Tout ce bois sec s’était rapidement consumé, et, quand les dernières lueurs s’éteignirent, on ne savait si le navire s’était rapproché du tell, car il ne signala même pas sa présence par un coup de canon.

De profondes ténèbres enveloppaient maintenant l’îlot. La nuit s’écoula, et aucun sifflement de vapeur, aucun ronflement d’hélice ou d’aubes battant les eaux du chott ne parvint aux oreilles des fugitifs.

« Il est là… il est là… », s’écria dès les premières blancheurs du matin Pistache, tandis que Coupe-à-cœur aboyait de toutes ses forces.

Le brigadier ne se trompait pas.

À deux milles était mouillé un petit bâtiment qui déployait à sa corne le pavillon français. Lorsque les flammes avaient illuminé cet îlot inconnu, le commandant avait modifié sa direction et mis le cap au sud-ouest. Mais, par prudence, l’îlot n’apparaissant plus après l’extinction des flammes, il avait envoyé son ancre par le fond et passé cette nuit au mouillage.

Le capitaine Hardigan et ses compagnons poussèrent des cris auxquels bientôt des voix répondirent, parmi lesquelles ils reconnurent, dans un canot qui s’approchait, celles du lieutenant Villette et du maréchal des logis-chef Nicol.

C’était l’aviso Benassir de Tunis, un vapeur de petit tonnage, arrivé depuis six jours à Gabès, et qui, le premier, s’était lancé intrépidement sur la nouvelle mer.

Quelques minutes après, le canot accostait le pied du tell qui avait été le salut des fugitifs et le capitaine Hardigan pressait dans ses bras le lieutenant, le marchef serrait dans les siens le brigadier Pistache, tandis que Coupe-à-cœur sautait au cou de son maître. Quant à M. François, Nicol eut grand-peine à le