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l’invasion de la mer

Plus qu’une seule chance de salut : atteindre le tell signalé par le brigadier Pistache. Là, sans doute, réapparaîtrait le sol résistant, jusqu’au groupe d’arbres en couronnant l’arête, et, dans ces conditions, toute sécurité serait assurée pour la nuit.

Mais, au milieu de l’obscurité, il devenait très difficile de se diriger. À peine était-il possible d’apercevoir ce tell. On ne savait plus s’il fallait prendre sur la droite ou sur la gauche.

À présent, le capitaine Hardigan et ses compagnons allaient au hasard, et seul le hasard pouvait les maintenir en bon chemin.

Enfin Coupe-à-cœur, en réalité leur véritable guide, fit entendre des aboiements précipités… Il semblait bien que le chien dût être d’une centaine de pas sur la gauche, et sur quelque hauteur.

« La butte est là… dit le brigadier.

— Oui… ajouta M. de Schaller, et nous nous en étions écartés. »

Que le chien eût trouvé le tell, et qu’il eût grimpé jusqu’aux arbres, cela ne paraissait plus douteux, et ses aboiements répétés invitaient certainement à le rejoindre.

C’est ce qui fut fait, mais au prix de quels efforts, et aussi de quels dangers ! Dès lors le sol remontait graduellement, en même temps qu’il redevenait plus solide. À sa surface se sentaient maintenant quelques rugueuses touffes de driss auxquelles les doigts pouvaient s’accrocher, et ce fut ainsi que tous, Pistache ayant donné un dernier coup de main à M. François, se trouvèrent sur le tell.

« Enfin… nous y sommes ! » s’écria le brigadier, en calmant Coupe-à-cœur qui gambadait près de lui.

Il était plus de huit heures alors. L’obscurité empêchait de rien voir aux alentours. S’étendre au pied des arbres, y prendre une nuit de repos, il n’y avait pas autre chose à faire. Mais, si le brigadier M. François, les deux spahis ne tardèrent pas à s’endormir, c’est en vain que M. de Schaller et le capitaine Hardigan attendirent le sommeil. Trop de préoccupations, d’inquiétudes les tinrent éveillés. N’étaient-ils pas comme des nau-