Page:Verne - L’Invasion de la mer.djvu/149

Cette page a été validée par deux contributeurs.
131
le second canal.

et ses successeurs, et que les inventeurs et constructeurs avaient imaginés et construits, au cours des années qui s’étaient écoulées entre le commencement d’exécution du projet Roudaire, celui plus avancé de la Compagnie Franco-étrangère, abandonné par celle-ci, comme on sait, et la reprise de l’affaire par la Société française de la mer Saharienne, sous la direction de M. de Schaller.

Tout ce qui avait été fait jusqu’alors était demeuré en assez bon état, selon les prévisions de l’ingénieur, qui les avait si éloquemment exposées, dans sa conférence de Gabès, en parlant des qualités essentielles de conservation de ce climat africain qui semble respecter jusqu’aux ruines ensevelies sous les sables, et exhumées il n’y a pas si longtemps. Mais, autour de ces travaux de canalisation presque, sinon tout à fait achevés, la solitude complète ! Où régnait naguère le mouvement d’une foule d’ouvriers, rien que le morne silence des espaces dépeuplés, où ne se rencontrait aucun être humain, et où seuls les travaux abandonnés attestaient que l’activité, la persévérance et l’énergie humaines avaient passé par là et donné momentanément à ces régions solitaires une apparence de vie.

C’était donc une inspection dans la solitude que M. de Schaller accomplissait, avant de mener à bonne fin de nouveaux et, il avait tout lieu de le croire, définitifs projets. Cependant cette solitude, à ce moment même, était plus inquiétante, et l’ingénieur éprouvait une véritable déconvenue en ne voyant venir à sa rencontre aucun des hommes de l’équipe de Biskra, ainsi qu’il avait été convenu.

La déception était cruelle ; mais, en y réfléchissant, M. de Schaller se disait qu’on ne se rend pas de Biskra au Rharsa comme de Paris à Saint-Cloud et que, dans une route aussi longue, un incident quelconque avait pu se produire, dérangeant les prévisions des calculs et modifiant les horaires. Et encore non, ce n’était pas possible, puisque l’agent lui avait télégraphié à Gabès, de Biskra, que tout s’était bien passé jusqu’à cette dernière ville et conformément aux instructions fournies à Paris même. C’était donc dans le trajet, peut-être dans la région maré-